Les oubliés

En 1970, j’étais en deuxième secondaire.

Mes études et surtout le cercle de naturalistes dont je faisais parti - Les Jeunes Écologistes - occupaient tout mon temps. Je ne savais à peu près rien de l’actualité. J’ai été témoin de quelques événements qui ont marqué le monde de cette époque: l’assasinat de Kennedy, Apollo 11 et le premier pas de l’homme sur la lune et le décès de Jimmy Hendrix. J’ai certainement entendu parler d’une guerre au Vietnam aussi…

En 1971, plus près de chez nous, ce fut la crise d’octobre: lecture du manifeste du FLQ par Gaétan Montreuil, images de soldats et d'une valise de voiture sur l’écran noir et blanc du salon.

À part cet événement peu « tranquille », la révolution tranquille avait déjà beaucoup changé la société québécoise et c’est dans ce contexte que Bureau d’aménagement de l’Est du Québec et l’Office de planification et de développement du Québec ont entrepris la fermeture de villages dévitalisés dans l’arrière-pays de l’Est du Québec.

Le processus était déjà annoncé et enclenché depuis plusieurs années:

-Il y eut l’exode des « colons* » à la recherche d’une vie meilleure le long de la côte.

-Ensuite, les communautés se sont dévitalisées et ont perdu progressivement leurs services publics.

Il ne restait qu’à procéder rapidement aux expropriations puis, lorsque la résistance se manifesta, de proposer des fermetures et des déplacements dits « volontaires » .

*… Enfin, ce sont des citoyens à qui on a attribué des terres à défricher pendant la grande dépression (Plan Vautrin du gouvernement Taschereau). Ils se sont déplacés des rives du Saint-Laurent ou de la Baie-des-Chaleurs pour coloniser l’arrière-pays. Certains d’entre eux, 40 ans plus tard, ont été contraints de brûler la maison qu’ils avaient construite… D’autres déportés sont même partis avec les dépouilles de leurs défunts.